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Analyse

Des Boeing contre la paix : vers un « deal » Trump-Poutine ?

Par
Henri DRUMAUD

Alors que la guerre en Ukraine s’enlise et que les négociations de paix peinent à produire des résultats concrets, une information relayée par l’agence Bloomberg a suscité de vives réactions. Selon cette source, Vladimir Poutine envisagerait d’utiliser des avoirs russes gelés aux États-Unis pour acheter des avions Boeing. Une perspective qui relance les interrogations sur les contours d’un éventuel accord tacite entre Moscou et Washington, à l’initiative de Donald Trump.

À ce jour, aucun échange officiel ne mentionne un tel accord. Mais les contacts à huis clos entre les deux parties auraient permis d’évoquer cette possibilité : débloquer une partie des fonds russes gelés — estimés à 5 milliards de dollars aux États-Unis et 280 milliards dans le monde — pour acquérir des appareils du constructeur américain. Officiellement, Washington exige un cessez-le-feu préalable. Mais la subtilité de langage est révélatrice : il est question d’un cessez-le-feu, pas d’un traité de paix. Ce qui pourrait ouvrir la voie à des manœuvres plus flexibles qu’il n’y paraît.

Pour les Russes, la levée partielle des gels financiers représenterait un véritable plan de relance. L’aviation civile russe souffre de sanctions sévères, notamment du blocage d’accès aux pièces détachées de Boeing et d’Airbus. Les compagnies aériennes, contraintes de désosser certains appareils pour en faire voler d’autres, peinent à maintenir une flotte opérationnelle.

Côté américain, l’industrie aéronautique traverse également une période délicate. Boeing, fragilisé par plusieurs scandales et une forte baisse des commandes internationales — notamment avec la Chine — dispose d’un stock important d’appareils non livrés. Une vente à la Russie, même indirecte, permettrait de soulager cette situation.

Une opération risquée pour la diplomatie occidentale

Ce projet soulève une inquiétude majeure : celle de relâcher la pression sur Moscou en l’absence d’accord de paix global. Les États-Unis, comme leurs alliés européens, affirment ne pas vouloir transiger sur les principes. En Europe, les intérêts issus des avoirs gelés sont utilisés pour financer l’effort de guerre ukrainien, mais toucher aux fonds eux-mêmes reste tabou, notamment pour des raisons juridiques liées à la stabilité des systèmes bancaires.

Une telle initiative, si elle venait à se concrétiser, pourrait mettre en difficulté l’unité des Occidentaux et poser la question de la légitimité d’une négociation « commerciale » au détriment d’un règlement politique durable.

Aussi, pour certains analystes, Vladimir Poutine utiliserait la perspective d’un deal pour gagner du temps, affaiblir la cohésion internationale et réinjecter de la liquidité dans une économie affaiblie par les sanctions et la baisse des revenus du pétrole. Du côté de Donald Trump, qui s’est plusieurs fois exprimé sur le coût de la guerre en Ukraine pour les contribuables américains, l’équation pourrait sembler simple : monnayer la paix — ou au moins un cessez-le-feu — contre un allègement ciblé des sanctions.

Mais le risque est réel : permettre à Moscou de récupérer une partie de ses fonds sans garanties solides pourrait saper les efforts diplomatiques et militaires engagés depuis deux ans.

Si l’on en croit les responsables américains, aucun accord n’est acté à ce stade. La position reste ferme : pas de levée des sanctions sans engagement clair en faveur de la paix. Toutefois, les déclarations du Kremlin sur « un potentiel de coopération économique stabilisateur » confirment l’intérêt de Moscou pour cette piste.

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