Les autorités nigérianes ont interdit la diffusion de la chanson Tell Your Papa, du rappeur Eedris Abdulkareem, jugée trop virulente à l’égard du président Bola Ahmed Tinubu. La Commission nationale de radiodiffusion (NBC) a ordonné aux médias audiovisuels du pays de ne plus la programmer, estimant son contenu “inacceptable”, selon le journal The Punch.
La décision s’appuie sur un article du Code de la radiodiffusion qui proscrit la diffusion de contenus jugés “inappropriés, offensants ou contraires aux bonnes mœurs”. Mais c’est surtout la charge politique du morceau qui semble déranger.
Dans Tell Your Papa (“Dis à ton papa”, en français), Eedris Abdulkareem s’adresse directement à Seyi Tinubu, le fils du président, après que ce dernier a qualifié son père de “plus grand président de l’histoire du Nigeria”. Le rappeur, lui, dresse un portrait beaucoup moins flatteur, pointant la dégradation des conditions de vie dans le pays et appelant Seyi à confronter son père sur les souffrances des Nigérians : pauvreté, insécurité, pénuries. “Les gens meurent”, lance-t-il dans les paroles, mêlant yoruba, anglais et pidgin.
Coup d’éclat ou erreur de communication ?
Sur les réseaux sociaux, Abdulkareem a dénoncé une tentative de museler la critique : “Au Nigeria, dire la vérité est encore considéré comme un crime grave.” Il a appelé les citoyens à écouter sa chanson en ligne, contournant ainsi la censure.
Une manœuvre contre-productive ? Pour Pretty Okafor, président de l’Association des musiciens nigérians (PMAN), la décision de la NBC est une “erreur majeure” : “Ceux qui n’avaient jamais entendu parler de la chanson vont maintenant la chercher et la partager. Elle va devenir virale.”
Ce n’est pas la première fois qu’Eedris Abdulkareem se heurte au pouvoir. En 2003, son titre Jaga jaga, qui dénonçait la corruption et l’effondrement de l’État, avait été interdit par le président Olusegun Obasanjo. Cela n’avait pas empêché la chanson de devenir un hymne populaire dans les rues du Nigeria.