Le sperme reste entouré de nombreuses idées reçues : serait-il bon pour la santé ? Est-il calorique ? Peut-il transmettre des maladies ? À travers cette analyse, le Dr Gilbert Bou Jaoudé, médecin spécialiste en santé sexuelle, démonte les mythes les plus répandus et apporte un éclairage médical clair et fondé sur les connaissances scientifiques actuelles.
Sommaire
Que contient réellement le sperme ?
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les spermatozoïdes ne représentent qu’une infime fraction du volume total du sperme (1 à 2 %). Le reste est composé principalement d’eau, enrichie en une multitude de micronutriments : protéines, fructose, sorbitol, vitamines (notamment C et B12), zinc, magnésium, phosphore, carnitine, entre autres. Ces éléments jouent un rôle fondamental : nourrir les spermatozoïdes afin qu’ils puissent survivre plusieurs heures, voire plusieurs jours, dans le corps féminin avant une éventuelle fécondation.
Des bienfaits pour la santé ?
Sur le plan strictement nutritionnel, ces micronutriments sont effectivement bons pour l’organisme. Toutefois, leur concentration est si faible dans un éjaculat (en moyenne 2 à 6 ml, soit l’équivalent d’une cuillère à café) qu’ils n’ont pas d’effet mesurable sur la santé. Pour bénéficier de leurs propriétés, il faudrait des volumes considérables – une perspective totalement irréaliste. Autrement dit, avaler du sperme n’est ni un danger ni un atout pour la santé.
Fait-il grossir ?
Le sperme contient un peu de sucre, ce qui amène certains à se demander s’il pourrait faire prendre du poids. En réalité, un éjaculat contient entre 5 et 10 calories. Une quantité négligeable, incapable d’influencer la balance énergétique. Là encore, seuls des volumes extrêmement élevés auraient un effet, ce qui n’est pas envisageable dans un contexte normal.
A-t-il des effets antidépresseurs ?
Cette idée repose en partie sur la présence d’oxytocine dans le sperme, une hormone associée à l’attachement et à l’apaisement. Une étude publiée en 2002 avait observé que les femmes ayant des rapports sexuels non protégés affichaient des niveaux d’anxiété et de dépression plus bas que celles utilisant un préservatif. Mais ces résultats ne prouvent en rien un effet direct du sperme : d’autres facteurs comme la stabilité de la relation, la fréquence des rapports ou le contexte émotionnel peuvent entrer en jeu. Aucune preuve sérieuse ne permet donc d’affirmer que l’ingestion de sperme a des effets antidépresseurs.
Risques pendant la grossesse ?
Des croyances anciennes prêtaient au sperme la capacité de « nourrir » le fœtus ou de favoriser l’accouchement. Certaines hormones qu’il contient (prostaglandines, oxytocine) peuvent effectivement influencer les contractions utérines. Toutefois, leur concentration est trop faible pour avoir un impact réel sur le déroulement d’une grossesse normale. De plus, le fœtus est protégé par une membrane hermétique : le sperme ne peut en aucun cas l’atteindre ou nuire à son développement.
Goût et odeur : l’influence de l’alimentation
Le goût et l’odeur du sperme peuvent varier selon les aliments consommés dans les 24 à 48 heures précédentes. Les produits soufrés (ail, oignon, asperges), les viandes rouges ou l’alcool peuvent le rendre plus amer. À l’inverse, une alimentation riche en fruits acidulés (kiwis, oranges, fruits rouges) tend à le rendre plus agréable. Ces variations sont naturelles et ne constituent pas un indicateur de santé ou de maladie.
Qu’en est-il des infections sexuellement transmissibles ?
C’est le principal risque réel lié à l’ingestion de sperme : la transmission de certaines IST. Le sperme peut contenir des agents pathogènes comme le virus du papillome humain (HPV), la chlamydia, ou plus rarement le VIH. Ces infections peuvent se transmettre lors des rapports oro-génitaux non protégés. Il est donc recommandé d’adopter des pratiques sexuelles protégées, notamment en cas de partenaires multiples ou inconnus.
L’allergie au sperme : une réalité rare
Enfin, même si cela reste exceptionnel, certaines personnes peuvent développer une allergie au sperme. Les symptômes sont comparables à d’autres réactions allergiques : démangeaisons, rougeurs, irritations. Dans de très rares cas, une réaction allergique dans la gorge peut entraîner des difficultés respiratoires. En cas de doute, un test sur la peau peut permettre d’écarter ce risque.
En somme, avaler du sperme n’est ni dangereux ni particulièrement bénéfique pour la santé. Les risques sont minimes lorsqu’il s’agit d’une relation stable et sans infection. Mais comme pour toute pratique sexuelle, l’information, le consentement et la prévention restent essentiels.